Yverdon-les-Bains, patrimoine thermal et minéral

Par Corinne Sandoz

La Journée mondiale de l’eau (22 mars) est l’occasion idéale pour évoquer le riche patrimoine en eau d’Yverdon-les-Bains. Dotée d’une source thermale sulfureuse et d’une eau minérale riche en magnésium, Yverdon a tous les ingrédients pour se positionner comme une ville incontournable du thermalisme. C’est donc tout naturellement que depuis le 18e siècle la cité utilise l’appellatif Yverdon-les-Bains dans sa promotion touristique, bien qu’officiellement la ville ne porte ce nom que depuis 40 ans (Rive Sud n. 24, novembre 2021).

La source thermale sulfureuse et sodique d’Yverdon, qui s’écoule à 28ºC, est sans doute déjà exploitée à l’époque romaine. En 1907, lors du curage du puits de la source, trois inscriptions romaines avec dédicace à Apollon ont été retrouvées. Elles appartenaient probablement à un sanctuaire qui devait se trouver à proximité. En effet, les Romains connaissaient déjà les propriétés curatives des eaux et Apollon, sous sa forme de dieu guérisseur, leur est fréquemment associé.

Réputées pour soulager les voies respiratoires et l’estomac, mais également pour soigner les articulations, les eaux curatives d’Yverdon ont favorisé l’installation de bains largement fréquentés dès le début du 18e siècle. L’âge d’or du tourisme thermal à Yverdon au 18e siècle et autour des années 1900 est relaté dans les travaux de l’historien Christian Schülé :  Le tourisme thermal à Yverdon-les-Bains au 18e siècle (2006) et D’eau et de pierre : l’expression architecturale des Bains d’Yverdon (2011). Gustave Emery, propriétaire des Bains de 1878 à 1904, donne ses lettres de noblesse à l’établissement, qui présente tous les attraits d’un lieu en vogue alliant les bienfaits du thermalisme au confort d’un séjour relaxant et qui attire des curistes de toute l’Europe et du Proche-Orient.

En 1903, la découverte de la source minérale riche en magnésium de La Prairie permet de proposer des cures qui combinent eau sulfurée chaude et eau magnésienne fraîche. Le 18 juin 1904, des curistes vantent ses vertus sur une carte postale : “Nous avons goûté à la nouvelle eau minérale, celle découverte l’an dernier près des Bains, à la Prairie. On dit qu’elle ressemble à celles de Contrexéville et de Vittel. Assurément de quoi établir sa renommée.”

D’abord consommée et mise en bouteille directement à la source, agrémentée d’un pavillon circulaire dès 1912, elle est commercialisée dès 1921 par Puzant Masraff, nouveau propriétaire des Bains et de la Pension La Prairie. Cet industriel arménien la nomme Arkina, en hommage à une source sacrée arménienne au pied du Mont Ararat. Comme ses consœurs vaudoises Romanel et Henniez, cette eau minérale connaît dès ses débuts un vif succès. En 1955, la source Bel-Air, acquise par Léon Masraff, vient augmenter la production de l’usine Arkina qui se poursuit jusqu’en 2008. Date à laquelle Feldschlösschen délocalise aussi bien l’activité que le label. Une décision qui laisse un goût amer aux Yverdonnois (Le Temps du 22 novembre 2007). Quelques années plus tard, Boxer rachète les sources (La Région du 7 mai 2014).

Aujourd’hui, le kiosque de l’ancienne source La Prairie et l’eau minérale d’Yverdon ne sont malheureusement plus exploités. Une réflexion est amorcée pour mettre en valeur et faire revivre ce riche patrimoine.


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